Pape-Mamadou Sene a surmonté mille obstacles pour réaliser son rêve : devenir médecin. Fier résident en médecine interne à la Faculté de médecine de l’UdeM, il revient sur son parcours du combattant.
La date du 16 mai 2017 restera à jamais gravée dans la tête et le cœur de Pape-Mamadou Sene. Ce jour-là, le jeune homme apprenait avec bonheur que sa candidature à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal était acceptée. Quelle surprise pour lui, mais surtout pour sa mère : son cher fils allait devenir docteur !
Enfant, pourtant, Pape-Mamadou Sene n’aurait jamais pensé devenir un professionnel de la santé. Dans son entourage, personne ne l’était. Et les conditions dans lesquelles il a grandi ne laissaient en rien présager des études en science.
Il part avec une longueur de retard
D’origine sénégalaise, Pape-Mamadou Sene a grandi aux côtés de ses deux frères et sœurs, dans l’un des quartiers les plus défavorisés de Montréal. Si l’on se fie à une étude de Statistique Canada, il partait avec une longueur de retard : « les jeunes hommes et les jeunes femmes noirs âgés de 13 à 17 ans en 2006 avaient une probabilité plus faible d’avoir complété un certificat, un diplôme ou un grade d’études postsecondaires en 2016 que leurs homologues dans le reste de la population ».
C’est sans compter ce terrible accident qui a failli lui coûter la vie à l’âge 12 ans. Alors qu’il attendait l’autobus dans le quartier Côte-des-Neiges, une camionnette l’a heurté violemment, le laissant gisant sur le trottoir avec de multiples fractures. Après deux ans de convalescence au CHU Sainte-Justine et de séances de réadaptation physique, l’adolescent miraculé a réussi à compléter son parcours académique avec succès.
C’est en discutant avec un ami haïtien que Pape-Mamadou a eu envie de faire un baccalauréat en pharmacie. « J’avais un intérêt marqué pour les sciences de la santé, et particulièrement pour la chimie. Sa motivation et son désir de me voir réussir m’ont inspiré. » Comme il n’avait pas les notes pour entrer en pharmacie, il s’est mis à lire sur la profession. Jusqu’au jour où il a demandé à faire des journées d’observation à la pharmacie du coin où travaillait sa sœur.
Les parcours sans obstacle n’existent pas. Il n’y a pas de cheminement parfait. Peu importe les circonstances, vous pouvez y arriver à votre façon.
Pape-Mamadou Sene, résident en médecine interne
Une nouvelle vocation est née
Après quatre années d’études, une nouvelle vocation se dessine : celle de médecin. « Je suis tombé amoureux de la médecine alors que je faisais des rotations de pharmacie à l’hôpital. Les résidents m’ont donné le goût de faire le saut. » Aujourd’hui, lui-même résident en première année en médecine interne et membre du conseil d’administration de la Société des sciences vasculaires du Québec, il a bénéficié des généreux conseils et du soutien indéfectible de son fidèle mentor, le cardiologue d’origine congolaise, le Dr Warner Mampuya.
À 29 ans, il poursuit son but ultime, celui d’humaniser la médecine. « Le bon médecin soigne la maladie ; le grand médecin soigne le patient qui a la maladie, dit-il en citant l’anatomopathologiste canadien William Osler. Mes décisions thérapeutiques se prennent en fonction de chaque patient que j’ai devant moi, en accord avec ses préférences et ses croyances. »
Pour les jeunes qui, comme lui, aspirent à étudier en science de la santé, il a ce message : « Les parcours sans obstacle n’existent pas. Il n’y a pas de cheminement parfait. Peu importe les circonstances, vous pouvez y arriver à votre façon. »
Par Déborah St-Victor