Monsieur Pierre S. Haddad, chercheur et professeur titulaire au Département de pharmacologie et physiologie, et cinq autres chercheurs canadiens viennent de recevoir une subvention de 3.5 M$ pour mettre sur pied le Réseau de recherche en santé autochtone au Québec.
S’échelonnant sur cinq ans, cette subvention des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) vise un changement de paradigme afin que les communautés autochtones puissent s’approprier les programmes de recherche en matière de santé. « Nous souhaitons que les questions et les projets de recherche puissent émerger des communautés elles-mêmes, en lien avec leurs priorités, leurs besoins et leurs capacités », indique monsieur Haddad.
Les instigateurs de ce réseau interuniversitaire et interdisciplinaire désirent explorer les moyens de décoloniser la recherche et d’améliorer les relations entre universités et communautés autochtones. Pour ce faire, ils visent notamment la création de bourses communes pour les étudiants et les mentors.
« Dans le monde universitaire, ce sont les étudiants qui reçoivent les bourses, comme les encadreurs et les enseignants sont déjà payés par l’institution, explique monsieur Haddad. Toutefois, chez les Autochtones, les porteurs de savoirs sont souvent des personnes qui n’ont pas d’emploi permanent, donc qui ne sont pas financés. »
À ce chapitre, monsieur Haddad insiste sur l’importance de reconnaître de manière pédagogique les savoirs et la sagesse autochtones, ainsi que la légitimité des aînés qui les portent. « On espère pouvoir décoloniser les institutions universitaires en valorisant la richesse des savoirs ancestraux et en créant des postes permanents pour les aînés. » En ce sens, une démarche pour valoriser l’expérience plutôt que les diplômes sera explorée, afin que ces encadreurs puissent participer à l’enseignement et à la formation.
Le bagage de Pierre S. Haddad
Riche d’une vaste expertise en santé autochtone, Pierre S. Haddad était tout désigné pour mener ce projet. Depuis 2003, il dirige l’équipe des IRSC sur les médecines autochtones antidiabétiques, en collaboration avec les Premières Nations. Le projet vise à étudier rigoureusement les plantes utilisées par les aînés et les guérisseurs d’Eeyou Istchee (territoire québécois réservé à la nation des Cris de l’Est) et autres Premières Nations, qui ont un potentiel antidiabétique prometteur.
Par l’entremise de leurs travaux, monsieur Haddad et son équipe ont mis au point une entente de recherche qui fait figure de précédent international pour donner préséance à la protection des savoirs traditionnels. Leur laboratoire est ainsi devenu une référence canadienne pour l’évaluation scientifique rigoureuse des produits de santé naturels.
« Je suis rendu à un point dans ma carrière où je veux avoir un impact social. Je veux utiliser mon expérience pour faire rayonner une vision du monde où les savoirs traditionnels autochtones sont mariés aux savoirs scientifiques allochtones, le tout dans une optique de santé intégrative. »
Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux