Jean-Claude Fouron : un trait d’union entre le Québec et Haïti

Jean-Claude Fouron : un trait d’union entre le Québec et Haïti

Né en Haïti et arrivé au Québec en 1960 pour sa dernière année de formation en pédiatrie, Jean-Claude Fouron est poussé par l’ambiance politique contemporaine haïtienne à entreprendre 2 années supplémentaires aux États-Unis en cardiologie pédiatrique. À son retour au Québec, il est engagé à temps plein comme cardio-pédiatre au CHU Sainte Justine, et est assistant professeur et chercheur au Département de pédiatrie de l’UdeM. Tout en cumulant les honneurs : conférencier invité international et national, Membre de l’Ordre du Canada, Officier de l’Ordre du Québec, récipiendaire des plaques Honneur et Mérite du Collège Haïtien de Cardiologie, Professeur émérite à l’UdeM, il n’a jamais cessé de travailler pour l’avancement des deux patries chères à son cœur.

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L’enseignement pour moi est un devoir et un plaisir. Je dirais même que c’est un privilège, car c’est une démarche qui transforme.

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Q. Quelle importance a occupé l’enseignement dans votre carrière?

R. Très tôt mon père m’a fait prendre conscience de l’importance du partage social; c’était un homme courageux et très généreux, avec une vision bien précise de son rôle de soignant. Il était un médecin très connu et apprécié dans toute la région sud-ouest de l’île où nous habitions. En plus de sa clinique, il créa un dispensaire où il soignait et nourrissait gratuitement les enfants pauvres. Ces valeurs de partage m’ont profondément marqué et sont encore, j’espère, toujours bien présentes en moi.

L’enseignement pour moi est un devoir et un plaisir. Je dirais même que c’est un privilège, car c’est une démarche qui transforme. L’enseignement est une forme de partage et je suis convaincu, encore aujourd’hui, que je reçois autant de mes étudiants que je leur transmets de nouvelles connaissances. L’important est de laisser souvent la parole à l’étudiant et surtout de l’écouter, car il faut avoir le sens du partage pour être un bon enseignant.

 

Q. D’où vous vient ce désir de toujours redonner à votre terre d’accueil et à votre pays d’origine?

R. Malheureusement, la réponse à cette question ne peut être brève. Mes retours de voyages en Haïti me perturbent de plus en plus profondément. Il est en effet crucial d’aider ce pays dont les besoins sont certes matériels, mais également plus fondamentaux : en effet, je ne suis pas le seul à penser que 300 ans d’esclavagisme (soit environ 6 générations d’esclaves!) ont laissé un héritage social pervers sur l’île compromettant le sens civique, l’entraide sociale, la notion d’égalité de tous les citoyens aux droits  fondamentaux tels que l’éducation, la santé, le  respect sacré de la vie humaine et surtout l’absence de supériorité ou d’infériorité raciale. Comment expliquer autrement qu’environ 60 % de la population haïtienne contemporaine soit encore analphabète après plus de deux siècles d’indépendance? Depuis de nombreuses années, je m’implique donc pour tenter de changer les choses. Je fais d’ailleurs partie de l’équipe de l’UdeM qui travaille à aider l’Université d’État d’Haïti à réformer son programme d’études médicales.

 

Q. Qu’est-ce qui fait que vous avez choisi de vous établir au Québec pour pratiquer la médecine?

R. Déjà tout jeune, dans le cadre de mes études primaires aux Cayes en Haïti, j’ai eu la chance d’être en contact avec des enseignants canadiens issus de communautés religieuses. Je dois dire que j’ai vraiment apprécié leur gentillesse et leur façon d’enseigner, rigoureuse, mais toujours conviviale et humaine. Ils ont été pour moi d’excellents modèles et de très bons ambassadeurs du Québec et des Québécois.

Mon expérience avec les Canadiens a donc été des plus positives dès le début et il était tout naturel pour moi de vouloir poursuivre ma formation dans ce pays qui, en plus d’offrir d’excellents programmes dans ce domaine, me permettait de le faire en français.

Je dois dire que j’ai rapidement été enchanté par la qualité de l’accueil reçu ici. Je me sens vraiment très privilégié et je demeurerai toujours reconnaissant envers les directions de l’Université de Montréal et du CHU Sainte Justine sans oublier mes collègues de travail pour un tel accueil.

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